Le hêtre est une proie de choix pour les classes moyennes chinoises. Il est utilisé en ébénisterie d’intérieur. Le Nord-Pas-de-Calais, l’Ile de France, la Picardie, la Bourgogne, la Lorraine sont les principales victimes des appétits chinois. La razzia s’étend aux résineux et aux feuillus du Limousin, des Pyrénées, des Landes et de Bretagne. Les maisons chinoises ont des charpentes en épicéa français. Le trafic de bois breton et de l’ouest de la France vers la Chine est prometteur pour le port de Brest.
Un million de m3 de bois brut ont été exportés de France vers la Chine en 2013 contre moins de 100.000 m3 en 2007.
L’Office National des Forêts devient l’Office Chinois des Forêts. La Chine, 1er menuisier du monde, encadre très sévèrement la coupe du bois sur son territoire. Le bois brut est quasiment détaxé à l’importation, les sciages sont taxés à 18%, les parquets à 40% et les meubles à 100%. La Chine pêche du bois en Europe comme ses navires pêchent les poissons sur l’océan mondial. Le chêne français se vend environ 100 € par m3 aux démarcheurs chinois. Transformé en planches, en parquets, ou en couvercles de WC, il revient là où il a mis un siècle au moins à pousser à 500 € par m3 et 2000 € sous forme de meubles.
En Amazonie, en Afrique, en Asie, on qualifie ce fléau de déforestation, en France on appelle ça du « commerce basé sur les règles de l’OMC appelant une réflexion de fond sur les termes du commerce international et sur les déséquilibres engendrés par le niveau des taxations » (réponses en 2013 du Ministère de l’Agriculture à des questions écrites d’élus).
Le désastre est économique. Les scieries et leurs emplois tombent les unes après les autres comme les feuilles mortes en automne.
Le désastre est biologique. Les coupes à blanc se multiplient en France et les arbres remarquables s’effacent peu à peu du paysage sous la pression conjointe du marché chinois et des granulés de bois qui alimentent les chaufferies collectives et les poêles à bois des maisons individuelles. En automne, un chêne adulte produit 90.000 glands et nourrit les écureuils et les oiseaux. Un hectare de chênes produit aussi 23 millions de feuilles qui tapissent le sol. Grâce à cette couverture fertile, prospèrent champignons, insectes, mollusques, micro-organismes au sein d’une communauté biotechnologique naturelle qui enrichit et retient les sols. L’exploitation intensive et précipitée des bois, des forêts, des haies, c’est aussi une paupérisation biologique.
Le Président de la République et son gouvernement seraient bien inspirés d’imiter les pays africains qui interdisent l’exportation des bois bruts sans transformation et de ralentir par tous les moyens réglementaires et fiscaux possibles le massacre à la tronçonneuse.
Robin des Bois <contact@robindesbois.org>