Dans le paysage, ces deux monts s’élèvent et attirent l’attention des curieux. Il faut dire que ce sont les seuls du territoire autunois. Entre Saint-Forgeot et Autun, ces terrils sont les vestiges de l’ancienne mine des Télots, où les hommes extrayaient jadis du schiste bitumineux. Des symboles d’un patrimoine industriel où la nature a repris ses droits. Du lierre grimpant sur les ruines aux oiseaux qui survolent les lieux, la faune et la flore se sont approprié les anciens bâtiments laissés à l’abandon depuis l’arrêt de la mine en 1957 ( lire par ailleurs ). « Les premiers arbres qui colonisent ce type de lieux abandonnés sont des arbres pionniers, comme les bouleaux et les trembles », explique David Beaudoin, président de la Société d’histoire naturelle d’Autun. Avec son chapeau et ses jumelles, c’est lui qui officie comme guide en cette fraîche matinée de septembre.
Selon le terrain et l’humidité, différentes espèces se sont développées sur le site. Photo JSL /Allan GRONOWSKI
Une zone naturelle qui suscite l’intérêt
« Vous entendez ce bruit ? On a l’impression de taper deux cailloux l’un contre l’autre. C’est une fauvette à tête noire. » Au milieu du bois et des sous-bois, l’ancienne mine des Télots abrite de nombreuses espèces : hérons, martins-pêcheurs, castors, grands ducs, loriots ainsi que des papillons, avec environ 250 espèces sur ce site. La biodiversité des lieux est d’ailleurs étudiée par les naturalistes. L’ancienne mine des Télots est reconnue comme zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff).
Traversé par l’Arroux, le site autrefois animé par l’activité humaine fait désormais place à un calme reposant, propice au développement de milieux différents. « C’est une vraie mosaïque où on retrouve la faune classique de la région. La forêt est relativement jeune mais il y a ici une vraie richesse. La zone géologique date d’il y a 295 millions d’années, une période qu’on appelle le Permien », indique David Beaudoin.
Des témoignages du passé et du présent
Entre deux bâtiments abandonnés recouverts de tags, deux passants croisés s’interrogent : « À quoi servait le schiste ici ? » Pour la réponse, pas besoin d’internet. « On faisait cuire le schiste pour en extraire l’essence. Les hydrocarbures sont dans la roche elle-même », détaille David Beaudoin. Contrairement aux mines de charbon, les terrils des Télots ne sont pas des déchets mais des restes d’exploitation. En se promenant dans les sous-bois, on trouve en revanche quelques vrais déchets abandonnés. La trace du passage de l’homme n’est jamais très loin.
Dans un ou deux siècles, que deviendra ce site ? « Avec l’action des animaux et des oiseaux, la biodiversité continue de se développer. Le futur dépendra des apports extérieurs qui enrichissent cette zone et de l’apport en eau, analyse David Beaudoin. L’installation des panneaux photovoltaïques à Saint-Forgeot , au pied de l’ancienne mine, aura peut-être une influence. » Les amoureux de la nature resteront en tout cas vigilants.
Casque de réalité virtuelle sur les yeux et manette en main, c’est un retour plus de 60 ans en arrière. En pleine immersion dans la mine des Télots en activité, des mineurs sont en train de percer ou forer avec l’outillage de l’époque. Les bâtiments ont été reconstitués à l’échelle. Une simple pression sur la gâchette ouvre une fenêtre d’informations sur l’extraction de schiste, le matériel ou les différents bâtiments. Un travail colossal réalisé en seulement trois mois par deux étudiants du parcours infographie 3D temps réel, Enes Berberoglu et Yan Gandré. « Si on avait pu ajouter l’odorat, on l’aurait fait, glisse Enes avec humour. Nous nous sommes relayés pour mener à bien ce projet, en travaillant quasiment 24 heures sur 24. »
La réalité virtuelle a le vent en poupe
Épaulés par Jacky Royet, président de l’association Musique aux champs , et par Dominique Chabard et Jean-Philippe Passaqui, deux historiens, les deux étudiants de Chalon se sont basés sur la maquette de la mine et une foule de photos. « Chaque élément, texture et éclairage, a nécessité un gros travail de recherche », souligne Jacky Royet. Ce projet a été élaboré durant leur stage sur le thème “de la pierre à l’essence”. Le résultat constitue un solide bagage dans le milieu de la réalité augmentée qui est en plein essor. « C’est un marchepied pour leur avenir professionnel. Ils bosseront dans des entreprises de pointe », présage Jacky Royet.